Attention aux suppléments contenant de l'acide hyaluronique

Attention aux suppléments contenant de l'acide hyaluronique
Par Magali Walkowicz publié le
Diététicienne-nutritionniste, journaliste et auteure
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Le vieillissement du corps est une étape inéluctable mais difficile pour autant d’accepter les signes du temps qui passe. Parmi l’arsenal pour retarder les rides, la sècheresse cutanée, les tâches sur la peau, les raideurs articulaires, l’acide hyaluronique (AH), arrive en tête. Nous nous sommes penchés sur la question des suppléments nutritionnels d’AH. Pilules miracles ou nocives ?

L’AH est un sucre. Un sucre que l’on trouve naturellement dans la peau, les yeux, les articulations et qui agit comme une éponge qui absorbe jusqu’à 500 à mille fois son poids en eau. La quantité d’AH dans le corps humain est de 15 g environ. La moitié est présent dans la peau. Il capte l’eau dans le derme et rend la peau rebondie, pulpeuse. Le reste joue un rôle d’amortisseur et de lubrifiant au niveau des articulations, réduisant la friction entre les os ou est un constituant de l’humeur vitrée de l’œil. L’organisme le synthétise ou le détruit en fonction de ses besoins.

Pourquoi prendre de l’AH quand on vieillit ?

Dès 30 ans, le stock d’AH naturellement présent dans le corps s’amenuise, ce qui engendre progressivement l’apparition des premières rides puis plus tard des joues creusées, une sècheresse des yeux, des douleurs articulaires. L’idée est donc d’apporter de l’acide hyaluronique au corps humain, par voie externe afin de conserver un pool intéressant et limiter les effets visibles du temps. Le plus souvent, en premier lieu, le choix se porte sur des cosmétiques à base d’AH (crèmes, sérums). Mais cet AH n’a de résultat que sur la peau (pas sur les yeux, ni sur les articulations), et a un résultat limité car il ne peut pas pénétrer la peau en profondeur. Il n’agit qu’en surface. Certain(e)s alors franchissent le cap des injections ciblés en cabinet médical. Pour ceux/celles cherchant une solution intermédiaire, il y a les suppléments nutritionnels, des gélules à avaler ou de la poudre à mélanger à une boisson. Le but, permettre à l’AH d’être absorbé par les parois intestinales et d’être bien utilisé par l’organisme. L’idée est séduisante. Potentiellement efficace. Mais certains chercheurs tirent la sonnette d’alarme.

Quel danger à trop augmenter le pool circulant d’AH dans le sang ?

Un taux élevé d’AH est un marqueur de cancer. Les cellules cancéreuses augmentent naturellement la production d’AH pour favoriser la croissance de la tumeur.

De nombreuses études scientifiques ont constaté qu’en augmentant également artificiellement le taux d’AH la croissance des tumeurs cancéreuses est accélérée.

Une équipe de biologistes et de cancérologues de l’Université du Michigan qui a mené des travaux sur des modèles précliniques de tumeurs pancréatiques, a même mis à jour que l’AH constitue une nourriture de choix pour les cellules cancéreuses du pancréas[1]. Dans le cas des tumeurs pancréatiques, il contribuerait aussi à la densité de la tumeur.

Mieux vaut donc, au nom du principe de précaution, s’abstenir de toute prise de suppléments d’AH ou alors ne faire que de courtes cures d’un mois, deux à trois fois l’année maximum – sauf en cas d’antécédents de cancer ou de prédisposition.

Les solutions pour booster en douceur – sans danger - l’AH dans l’organisme

Mangez des aliments source d’AH ou stimulez sa production naturelle.

L’AH ne se trouve pas en grande quantité dans l’alimentation courante. Vous pouvez en trouver surtout dans :

  • le bouillon d'os. Les os et les cartilages de bœuf, veau, agneau et/ou volaille sont mijotés dans de l'eau pendant 12 à 48 heures ;
  • les abats ;
  • la gélatine.

L’AH n’est pas présent dans les aliments suivants, mais ils aident à sa synthèse. Soit :

  • parce qu’ils contiennent des molécules antioxydantes comme l’huile de foie de morue, les fruits et légumes très colorés, les herbes aromatiques, les épices. Les agrumes, les figues, les tomates, contiennent de la naringénine qui bloque l'activité de la hyaluronidase, une enzyme responsable de la dégradation de l'acide hyaluronique ;

En 2010, une étude chinoise a classé le néflier du Japon en seconde position sur 56 plantes antioxydantes utilisées en médecine traditionnelle. Différents composés isolés des feuilles présentent une activité anti-âge élevée en stimulant la production de collagène et d’AH [1]. Réduites en poudre, les feuilles du néflier du Japon se prennent en tisanes.

 

  • ou parce qu’ils contiennent des phyto-oestrogènes comme le soja - des substances qui imitent les effets de l'hormone œstrogène qui augmente les niveaux d'AH dans le corps. Les phytoestrogènes des aliments à base de soja auraient des effets similaires.[1]

Pour une prévention ultime, attention à l’exposome = l’ensemble d’éléments externes et internes auxquels nous sommes quotidiennement exposés et qui accélèrent les signes visibles et invisibles du temps. Protégez-vous donc de la pollution, des UV du soleil, de la lumière bleue des ordinateurs, du tabac, de l’alcool, du stress, des hormones, de la nourriture industrielle, des sodas et dormez bien.

 

[1]  Tao Liu & al., Recent advances in the anti‐aging effects of phytoestrogens on collagen, water content, and oxidative stress, Phytother Res. (2020) & Desmawati Desmawati, Delmi Sulastri, Phytoestrogens and Their Health Effect, J Med Sci. (2019)

 


[1] Tan H, Sonam T, Shimizu K (2017). The Potential of Triterpenoids from Loquat Leaves (Eriobotrya japonica) for Prevention and Treatment of Skin Disorder. Int J Mol Sci. 18(5). pii: E1030.


[1] Peter K Kim, Christopher J Halbrook, Samuel A Kerk et al. Hyaluronic acid fuels pancreatic cancer cell growth. eLife 10:e62645. (2021). https://doi.org/10.7554/eLife.62645