La consommation de produits bio a doublé en six ans

Par Bioalaune publié le

  DR - Charles Kloboukoff,fondateur de Léa Nature.  

Alors que Le printemps Bio, quinzaine nationale de promotion des produits issus de l'agriculture biologique, s'est ouvert mardi 1er juin, Charles Kloboukoff, président fondateur du groupe Léa Nature, pionnier de la distribution de produits bio et naturels en France, revient sur les progrès accomplis ces dernières années.
 

Quel bilan faites-vous aujourd'hui du développement du marché des produits bio?
 

Dans les années 1980, on a vu apparaître une nouvelle gamme de produits qui tranchait avec le commerce traditionnel. On parlait alors plutôt de « produits naturels », sans colorants ni conservateurs. A partir de ce moment là, plusieurs labels sans cesse améliorés se sont succédés jusqu'à l'appellation Agriculture Biologique (AB) que l'on connaît aujourd'hui. Actuellement, la création d'un label européen tout aussi exigeant est en cours
 

Simple phénomène de mode ou véritable mouvement de fond?
 

Etant donné la place de plus en plus sérieuse que l'on accorde à l'écologie, je crois que l'on revient peu à peu à une agriculture naturelle. Mais de nombreux efforts sont étouffés par les lobbies. Depuis l'après-guerre, les progrès techniques et la mécanisation outrancière de l'agriculture ont contribué à la transformer en véritable industrie. Pour accroître la productivité et répondre aux besoins de la population, la science a mis au point des produits chimiques à effet immédiat. Or ces produits, pour aussi efficaces qu'ils sont, s'avèrent très nocifs à long terme. On commence à peine à parler de leur responsabilité dans les longues maladies comme le cancer, dans les problèmes dermatologiques ou encore dans l'infertilité... Il est difficile de remettre en question tout un système au bout de quarante ans. Il faudrait refonder entièrement l'agriculture et encourager les agriculteurs traditionnels à la reconversion. Aujourd'hui, le bio représente 2% du marché. C'est peu, mais la consommation a doublé en six ans. Même si ce chiffre peut paraître marginal, il est appelé à se développer rapidement.
 

Le coût du bio reste un frein pour bon nombre de consommateurs. L'écart de prix peut atteindre de 15 à 20%. Comment l'expliquez-vous?
 

Beaucoup de critères sont à prendre en compte. La plupart des entreprises écologiques sont « à taille humaine » et fonctionnent avec des effectifs réduits. La distribution est encore peu organisée et le transport des marchandises reste coûteux. Mais le marché du bio est en pleine expansion et cet accroissement va nous permettre de mieux amortir nos frais. Il faudrait également un système d'aides fiscales pour les entreprises « vertes ». Lorsque l'on considère le prix des produits « standards », on ne tient pas compte des dépenses induites par leur impact en termes de pollution, santé
 

La crise économique a-t-elle limité la croissance du bio?
 

En 2009, la croissance s'est maintenue autour de 15 à 20%. En revanche, depuis janvier 2010, nous observons un net ralentissement. Il faut dire que les trois dernières années avaient été particulièrement fastes avec une croissance de 25% par an. Malgré cela, le marché continue aujourd'hui de progresser de 4%. De manière générale, la consommation des ménages a été très touchée et les gens ont tendance à diminuer leurs dépenses. Un constat qui s'applique également aux produits bio : les points de vente et rayons sont toujours très fréquentés, mais le panier moyen est passé de 30 à 25 euros.
 

D'autres modèles, dont votre entreprise est également fer de lance, comme le commerce équitable ou la production locale se développent désormais. Pensez-vous qu'ils peuvent se rejoindre?
 

Tout à fait. Relocaliser devient une préoccupation générale, tant au niveau social qu'écologique : pourquoi faire venir de loin ce qui peut pousser près de chez nous ? Concernant les produits emblématiques qui ne peuvent être cultivés sur place, comme le riz, le thé ou le café, le commerce équitable doit devenir un réflexe. Comme nous, de plus en plus d'entreprises s'engagent progressivement dans le développement durable et des personnalités telles que Pierre Rabhi commencent à trouver une place dans le domaine public. D'autres initiatives, comme les Associations pour le maintien d'une agriculture paysanne (AMAP) par exemple, témoignent également de ce souci de ré-humaniser la société.

 

lexpress.fr - Par Charlotte Hélias, publié le 02/06/2010 à 14:27