Au nom de l'environnement, la justice rejette le projet d'agrandissement de l'aéroport d'Heathrow à Londres

aéroport Heathrow
Au nom de l'environnement, la justice britannique rejette le projet d'agrandissement d'Heathrow
© Handout - Heathrow airport/AFP/Archives
Par AFP /Relaxnews publié le

La justice britannique a donné raison jeudi aux écologistes opposés à la construction d'une troisième piste à l'aéroport londonien d'Heathrow, le plus fréquenté d'Europe, ce qui pourrait enterrer le projet à moins que le gouvernement ne revoie sa copie.

Cette décision est symbolique pour les défenseurs de l'environnement à quelques mois de l'organisation de la COP26 à Glasgow et pourrait peser sur les futurs projets d'infrastructure du gouvernement à travers le pays pour aider l'économie après le Brexit. La cour d'appel de Londres a jugé que ce projet d'extension n'était pas assez respectueux de l'environnement et que le précédent gouvernement conservateur, qui l'a approuvée en 2018, aurait dû tenir davantage compte des accords de Paris de 2015 visant à limiter le réchauffement climatique.

"Les accords de Paris auraient dû être pris en compte par le ministre (des Transports, ndlr) (...) et il aurait dû expliquer comment il les prenait en compte, mais cela n'a pas été le cas", a déclaré le juge Keith Lindblom. "Nous avons gagné !", se sont écriés à l'énoncé de la décision les militants écologistes rassemblés devant la haute cour de Londres. Parmi eux, le directeur général de Greenpeace pour le Royaume-Uni, John Sauven, a expliqué à l'AFP qu'il s'agissait d'une "victoire fantastique que nous attendions depuis tant d'années". "C'était très important en cette année où nous avons le sommet sur le climat (COP26, ndlr) à Glasgow. Renoncer à la troisième piste serait un message très puissant envoyé au reste du monde", souligne-t-il.

L'aéroport d'Heathrow a immédiatement fait savoir qu'il faisait appel devant la Cour suprême. "Nous pensons pouvoir l'emporter. D'ici là, nous sommes prêts à travailler avec le gouvernement pour trouver une solution au problème soulevé par la cour", selon un porte-parole. Le gouvernement lui ne va pas faire appel alors que le conservateur Boris Johnson n'a jamais caché son opposition au projet.

"J'appelle le gouvernement à ne pas simplement revoir ces plans pour la troisième piste mais de simplement les abandonner", a déclaré le maire de Londres Sadiq Khan, qui soutenait cette procédure, rejetée en première instance en 2019.

"Céder le contrôle aux Français"

Ce projet faramineux, d'un coût de 14 milliards de livres (16,5 milliards d'euros) pour sa première phase, est un dossier épineux pour les pouvoirs publics qui viennent de valider un autre projet vivement contesté, celui de la ligne de train à grande vitesse HS2 qui doit relier Londres au centre et au nord de l'Angleterre. Par le passé, Boris Johnson avait affirmé qu'il n'hésiterait pas à se mettre en travers des bulldozers pour empêcher la construction de la piste. Et en décembre, il a exprimé des "doutes" sur la capacité des promoteurs à préserver la qualité de l'air et limiter la pollution sonore.

Ce projet pourrait compliquer la tâche du gouvernement qui a promis que le pays atteindrait la neutralité carbone d'ici 2050. La construction d'une troisième piste à Heathrow, situé à l'ouest de Londres, est censée permettre à cet aéroport d'accueillir à terme 130 millions de passagers par an, contre 78 millions à l'heure actuelle. Les travaux devaient en principe débuter en 2022 et durer quatre ans et le projet devait être financé par le consortium d'investisseurs propriétaire de l'aéroport, dont des fonds souverains de Chine, de Singapour et du Qatar.

Le directeur général de l'aéroport, John Holland-Kaye, n'a eu de cesse de défendre les vertus de l'agrandissement, qui doit permettre selon lui de participer au rayonnement international du pays après le Brexit et de soutenir la croissance économique. Il est même allé jusqu'à affirmer mercredi que refuser l'extension d'Heathrow reviendrait à avantager l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle et à "céder le contrôle de l'économie aux Français, autrefois nos amis et partenaires et désormais nos rivaux", après la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne le 31 janvier.