Covid-19 : après les réanimations, les services de rééducation sous pression

service rééducation post coronavirus
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Par AFP /Relaxnews publié le

L'épidémie de coronavirus provoque un afflux de malades convalescents dans les services de soins de suite et de réadaptations (SSR) franciliens, avec un risque d'engorgement faute de pouvoir transférer en Ehpad les patients les plus âgés.

Dans le sillage des services de réanimation, la "vague" a aussi déferlé sur les services de soins de suite et de réadaptations (SSR). "On a beaucoup craint le débordement, il semblerait que ça ne se confirme pas", confie prudemment le Pr Pascale Pradat, cheffe de service à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière.

Faire de la place dans les SSR

Contrairement aux services de "réas", le reflux se fait encore attendre en SSR : en Ile-de-France, le nombre de patients "Covid" en rééducation est passé de 2 200 mi-avril à 3 662 lundi, selon l'Agence régionale de santé (ARS). Soit tout de même un cinquième des 18 000 lits potentiellement disponibles dans les hôpitaux et les cliniques, d'ordinaire réservés aux suites chirurgicales, aux grand brûlés, aux séquelles d'AVC ou d'accidents de la route, mais aussi aux personnes âgées en perte d'autonomie.

Pour faire de la place, "la dynamique a d'abord été de vider les SSR des patients qui n'avaient plus besoin d'y être", explique le Pr Pradat. L'annulation des opérations programmées et le confinement ont ensuite tari le flot habituel des convalescents. Cela a jusqu'ici suffi pour accueillir les rescapés du coronavirus sans transferts vers d'autres régions, même si cette option "a été envisagée", admet-elle.

Un accompagnement souvent nécessaire après la réanimation

Le nombre vertigineux de malades passés par la réanimation (6.500 en Ile-de-France, 16.000 au niveau national d'après les données de Santé publique France) a mécaniquement accru la pression : selon l'ARS, "environ 15% à 20%" de ceux qui en sont sortis vivants ont eu ou auront "besoin de soins de suite". La majorité passe toutefois par un service de médecine (pneumologie, maladies infectieuses) avant un retour à domicile parfois accompagné d'un programme de rééducation.

Dans la plupart des cas, ces hospitalisations durent "de l'ordre de deux semaines" et ceux qui sont orientés en SSR y restent un temps "nettement plus faible" que les autres patients "traditionnellement accueillis" dans cette filière.

Un passage long des personnes âgées en soins de suite

Le problème vient plutôt d'une autre catégorie de malades. "Chez les personnes âgées infectées et admises en gériatrie ou aux urgences, les passages en SSR sont beaucoup plus fréquents", constate le Pr Pradat. Or, cette population met plus de temps à se rétablir. "Il y a probablement une différence de durée de séjour, liée à leur capacité d'en sortir", estime-t-elle.

D'où "le travail fait auprès des Ehpad pour qu'ils puissent réadmettre des résidents", les maisons de retraite ayant drastiquement limité les entrées depuis deux mois.

Des effectifs insuffisants

La cheffe de service s'inquiète aussi de la "forte pression" des chirurgiens, impatients de reprendre leur activité, ce que le ministre de la Santé Olivier Véran a accepté sous certaines conditions "dans les régions où le virus circule peu".

"Il faut voir l'ensemble de la chaîne de soins. Ce qui n'est pas urgent, le SSR ne pourra pas l'assumer derrière", prévient le Pr Pradat, mettant en garde contre un double risque "d'engorgement lié au Covid" et de "défaut d'accès pour les autres patients".

D'autant plus que les effectifs, déjà insuffisants, pourraient rapidement manquer. Fin avril, les établissements franciliens avaient besoin de 788 soignants (en équivalent temps plein) selon l'ARS. Seulement 100 avaient pu être "répartis", essentiellement des infirmiers, aides-soignants et kinés, auxquels se sont ajoutés des "étudiants et professionnels de santé volontaires".

"On a eu des renforts, mais ils vont partir et l'été va arriver", appréhende le Pr Pradat, soucieuse de disposer d'assez de bras pour faire tourner son "service à très forte demande de moyens médicaux". Pour l'heure, "on n'est pas en situation d'urgence, mais de prudence".