75% des miels sont contaminés par les pesticides

75% des miels sont contaminés par les pesticides
75% des miels sont contaminés par les pesticides
Par Elodie Sillaro publié le
Journaliste
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Des traces de néonicotinoïdes ont été retrouvées dans 75% des miels produits dans le monde, selon une étude de chercheurs suisses. Et, les miels d’Europe se classent au 3e rang mondial des plus contaminés. Cette nouvelle enquête inquiète quant à la survie des abeilles.

Les néonicotinoïdes sont des insecticides déversés sur les terres agricoles contaminant le nectar et le pollen des fleurs. Ces pesticides sont transportés dans le pollen et le nectar dans les ruches pour la fabrication du miel, où leur consommation perturbe le fonctionnement du cerveau des pollinisateurs, contribuant à l'effondrement général des colonies d’abeilles.

L’Europe, 3e rang mondial des miels les plus contaminés

L’analyse des chercheurs de l’Université de Neuchâtel (Suisse) s’est portée sur 198 échantillons de miels issus des six grandes régions du monde. Elle a mesuré la concentration des cinq pesticides de la famille des néonicotinoïdes les plus couramment utilisés : acétamipride, clothianidine, imidaclopride, thiaclopride et thiaméthoxame. Résultats, l’Amérique du Nord arrive en tête des échantillons contaminés (89%), suivie de l’Asie (80%) et de l’Europe (79%).

“Ces résultats suggèrent qu'une partie importante des pollinisateurs dans le monde sont probablement affectés par les néonicotinoïdes”, expliquent les scientifiques.

En Europe, les échantillons ont été recueillis en grande partie avant que l'utilisation de néonicotinoïdes sur les cultures pollinisées par les abeilles soit en partie interdite. En juin 2016, les députés avaient décrété l’interdiction partielle des insecticides de la famille des néonicotinoïdes à partir de septembre 2018, avec des exemptions possibles jusqu’en 2020. Des analyses supplémentaires sont donc nécessaires pour évaluer l'efficacité de cette éviction partielle.

Une addiction qui entraîne leur déclin

En 2016, une récente avait pu démontrer que les butineuses préféraient les plantes contaminées par les néonicotinoïdes plutôt que celles qui ne le sont pas. Loin de repousser les abeilles, ces derniers les attirent. Effectivement, comme leur nom l’indique, les néonicotinoïdes sont des insecticides neurotoxiques dérivés de la nicotine.

L'exposition des abeilles aux néonicotinoïdes entraîne un dysfonctionnement neuronal qui limite leur capacité à apprendre et à se rappeler. Elles montrent par exemple des difficultés à associer un parfum floral à la récompense du sucre. Les bourdons manifestent ainsi des difficultés pour s’alimenter et à faire croître la colonie, entraînant le déclin des essaims.

Une menace à prendre au sérieux

Nous le savons, la biodiversité est en danger et les abeilles sont les premières victimes. Selon l’UNAF (Union nationale de l’apiculture française), près de 300 000 ruches périssent chaque année et la production française de miel a été divisée par deux en 20 ans. En novembre 2016, The United States Fish and Wildlife Service (l’agence pour la protection des espèces en voie de disparition) avait même classé les abeilles comme espèce en voie de disparition. La surmortalité des abeilles est causée par l’utilisation des pesticides néonicotinoïdes.


©GRAPHIQUE: C. BICKEL / SCIENCE

“Les niveaux relevés sont suffisants pour affecter les fonctions cérébrales des abeilles et pourraient entraver leur habileté à trouver de la nourriture et à polliniser nos cultures et notre végétation", expliquent les chercheurs.

Ce syndrome de l’effondrement des colonies d’abeille représente une grande menace pour la biodiversité ainsi que pour l’homme. En plus d’une perte des espèces végétales, la disparition des abeilles engendrerait une baisse des approvisionnements mondiaux de fruits, de légumes, de noix et de graines avec pour conséquence des modifications de notre alimentation accompagnée de carences et de maladies. Nos actes d'achat n'étant pas anodin, il est donc important de soutenir l'agriculture biologique, notamment via la consommation de produits biologiques (fruits, légumes et miel) ainsi que soutenir l'apiculture biologique et appliquer des gestes simples pour protéger les abeilles : favoriser le miel bio et local, faire pousser des fleurs, installer une ruche.