Après la crise sanitaire, place au slow working ?

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Après la crise sanitaire, place au slow working ?
Par Dorothée Blancheton publié le
Journaliste indépendante

La crise sanitaire bouleverse le quotidien, du point de vue professionnel comme personnel, et amène à revoir ses priorités. Si vous aspirez à davantage d’équilibre dans votre vie, le slow working, concept qui consiste à travailler moins mais plus efficacement, pourrait vous intéresser...

Le premier confinement imposé en France au printemps en raison de la crise sanitaire a bouleversé du jour au lendemain la routine « métro-boulot-dodo ». Il a fallu trouver un nouveau rythme pour concilier au mieux vie professionnelle et personnelle. Un freinage parfois brutal tant le quotidien était d’ordinaire mouvementé. En novembre 2019, la 11ème édition du baromètre « Santé et qualité de vie au travail », mené par Malakoff Médéric Humanis, attestait de cette vie menée tambour battant. Ainsi, 46% des salariés avaient la sensation que leur rythme de travail s’était accéléré au cours des douze derniers mois ; 70% disaient devoir travailler très vite et très intensément et 36% confiaient concilier difficilement vie pro et perso. Ils plébiscitaient alors des horaires de travail plus souples (47%), une réduction du temps de travail (31%) et le recours au télétravail (25%).

Travailler moins mais mieux

Face à cette culture de la performance et la pression ressentie, le slow working pourrait séduire nombre de Français. Cette pratique émerge doucement depuis à peu près quatre ans. Elle découle de tout le mouvement « slow » initié à la fin des années 80 avec le « slow food » développé par Carlo Petrini, journaliste, critique gastronomique et sociologue italien. Depuis, ce concept s’est propagé à d’autres secteurs (slow cosmétique, slow parenting...). Mais gare aux raccourcis : « le slow working, ce n’est pas renoncer aux objectifs ni à la performance. C’est voir dans quelles conditions on peut les atteindre tout en préservant son équilibre et sa santé. Ca s’inscrit dans le fait de travailler différemment, en dosant son effort, pour tenir sur la durée », explique Diane Ballonad Rolland, coach, formatrice, fondatrice du cabinet Temps et Equilibre et auteure du premier ouvrage en France sur le sujet « Slow working, 10 séances d’autocoaching pour travailler moins mais mieux » aux éditions Vuibert.

Des intérêts pour les entreprises et les salariés

Le slow working permettrait ainsi aux salariés de repenser leur manière de travailler, selon la marge de manœuvre propre à leur activité et leur fonction, afin d’optimiser leur temps. Plus disponibles, ils pourraient alors récupérer ce temps libre pour gérer leurs impératifs personnels, profiter de leurs proches, se détendre, faire du sport... 
Cela comprend aussi des avantages pour les entreprises. En gérant différemment leur travail et leur temps, les employés sont moins à même de connaître un épuisement professionnel, du découragement, de l’ennui... « Ca représente un coût pour les entreprises quand les employés sont en souffrance au travail car cela se ressent sur les performances », analyse Diane Ballonad Rolland.

Des freins à lever

Le premier confinement a été un premier pas vers le slow working avec le recours important au télétravail. « Beaucoup d’entreprises étaient jusque-là réticentes par manque de confiance. Il faut dire que la culture du présentéisme est très forte en France : il faut montrer qu’on est actif alors on reste tard au travail, on envoie des mails très tôt le matin... Mais ce n’est pas le temps passé sur une tâche qui rend efficace. Les entreprises qui ont joué le jeu ont vu qu’on pouvait travailler autrement pendant le confinement même si le présentiel reste important », ajoute l’experte. 
Ainsi pour assurer une transition vers le slow working, il faudrait se détacher de ce présentéisme et être davantage dans la réflexion pour prendre de la hauteur. « C’est un message difficile à faire passer car l’action prime. Mais c’est une aberration quand on passe 50% de son temps en réunion et que l’on court ensuite pour assurer l’organisationnel, le management des équipes... », plaide Diane Ballonad Rolland.

De nouvelles habitudes à prendre

Pour adopter le slow working, il n’y a pas une recette. Cela dépend de la situation de chacun et de sa marge de manœuvre. Mais la spécialiste conseille de commencer par s’interroger sur son rythme de travail : est-il soutenu ? Oppressant ? Avez-vous l’impression de courir tout le temps ? De ne jamais avoir le temps de tout faire ? 
Ensuite, on peut s’interroger sur ce qui est vraiment urgent et sur ce qu’il faut mettre en place pour y parer. « Il est important de cultiver la pleine conscience dans ce que l’on fait pour fixer des objectifs clairs, hiérarchisés et appliquer une stratégie. Les pauses courtes mais régulières sont également nécessaires pour permettre à notre cerveau d’être efficace », préconise la coach et formatrice. On ralentit donc pour réfléchir car la vitesse n’est pas synonyme d’efficacité. Le slow working implique ainsi de ne pas être sur trop de choses en même temps mais de trouver un équilibre entre le trop et le trop peu, d’être moins multitâche pour être plus concentré sur ses missions. « Bien sûr, pendant la crise, les entreprises et salariés ont bien d’autres urgences à traiter car pour certains il est question de survie de l’activité professionnelle avant tout », reconnaît Diane Ballonad Rolland. Mais le sujet continue de faire son chemin...
 

Photo : pixabay