Larves, algues, viande de synthèse : que mangera-t-on dans cinquante ans ?

morceau de viande analysé, larves et comprimés alimentaires d'algues
Quels sont les aliments de demain ?
Par Manon Laplace publié le
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842 millions de personnes souffrent de la faim dans le monde, et la population devrait augmenter de près de deux milliards d'individus d'ici 2050. Face à cette situation, les modèles de production actuels semblent à bout de souffle et des sociétés travaillent à l'élaboration de la nourriture de demain. 

D’ici 2050, la population mondiale devrait s’élever à 9 milliards d’individus. Autant de personnes qu’il va falloir nourrir, ce que nos actuels modes de production ne sont pas capable de faire. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), des pénuries de terres agricoles, d’eau, des ressources de la biodiversité et des énergies fossiles sont à prévoir. Pour certains, il faudrait abandonner l’élevage, trop énergivore et se tourner par exemple vers la viande in vitro. Pour d’autres, l’avenir de la nutrition réside dans des aliments comme les algues ou les insectes. Pour les derniers, il faudrait déconstruire totalement les modèles agroéconomiques connus. En attendant, la tendance est au développement de nouvelles méthodes de production, moins consommatrices. Bio à la une revient sur trois aliments qui pourraient gagner nos assiettes dans les années à venir.

Les insectes

Récurrents dans la gastronomie de certaines cultures, les insectes ne donnent pas franchement envie aux occidentaux. Leur culture se développe pourtant, et on voit naître, notamment en France, des sociétés d’élevage et de vente d’insectes destinés à l'alimentation humaine. Les vers de farine, les grillons domestiques ou encore les criquets sont parmi les espèces comestibles les plus répandues. Les vers de farine, qui sont en fait des larves de scarabée, ont un profile nutritionnel très intéressant. Riches en cuivre, sodium, potassium, fer, zinc ou sélénium, ils sont aussi une source précieuse de protéines. Plus encore, l'élevage des insectes est très peu consommateur en énergie, contrairement à celui du bétail. Selon la FAO, les insectes nécessiteraient six fois moins de nourriture que les bovins, deux fois moins que les porcs ou les poulets, et émettraient bien moins de gaz à effet de serre. Mais le chemin vers l'assiette du consommateur est encore long. Selon une enquête Ipsos réalisée dans cinq pays dont la France et l'Allemagne, l'aspect gustatif avec la notion de plaisir alimentaire est l'un des critères dominants des acheteurs. Et, toujours selon Ipsos, les Français seraient parmi les plus frileux face à ce genre de nouveauté. D'autant que pour l'instant, la réglementation novel food interdit la mise sur le marché des insectes en Europe. Et les dérogations demandent des procédures longues et coûteuses.

Les algues

Plus courantes que les insectes mais pas encore totalement ancrées dans nos habitudes de consommation, les algues pourraient bien occuper une place importante dans notre alimentation future. Si les micro-algues qui entrent dans la composition de certains cosmétiques, ou sont à l'étude pour produire du biocarburant sont coûteuses, les algues alimentaires sont faciles à produire et peu consommatrices en énergie. Si leur goût peine encore souvent à séduire, elles ont des avantages nutritionnels étonnants, à l’instar de la spiruline dont une poignée contient la même quantité de protéines que 500 g de viande rouge, autant de calcium que trois verres de lait ou encore autant de fer que trois grands bols d’épinards. Encore faut-il convaincre les consommateurs réfractaires, mais aussi les entreprises. Car les modèles d'exploitation restent assez peu lucratifs.

La viande in vitro

En août 2013, le Néerlandais Mark Post, chercheur à l'Université de Maastricht, révélait son“frankenburger”. Un steak haché intégralement créé en laboratoire.  Cette viande in vitro nécessite le prélèvement de tissus musculaires bovins cultivés dans du sérum de veau foetal avant qu’y soient ajoutés de la chapelure du sel ou de la poudre d’oeuf pour la texture et le goût. Mais au-delà de sa saveur "trop prononcée" selon ceux qui l'auraient testé, le coût de production du frankenburger est exorbitant, puisque son prix au gramme vaut cinquante fois celui de l’or. Le développement de la viande de synthèse n’en est encore qu’à ses balbutiements et soulève de vifs débats. D’autant que pour certains, ce genre de modèle d’élevage sacrifie les 500 millions d’agriculteurs actuels qui nourrissent la population mondiale.


Rédaction : Manon Laplace