Alzheimer : les bénéfices du régime cétogène pour diminuer les symptômes

Alzheimer et régime cétogène
Alzheimer et régime cétogène
© Stocklib
Par Magali Walkowicz publié le
Diététicienne-nutritionniste, journaliste et auteure
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Aucun traitement médicamenteux ne parvient à ce jour à enrayer les maladies neurodégénératives telles que Alzheimer et Parkinson. De plus en plus de patients, refusant l’évolution de la maladie et l’issue dramatique, cherchent des solutions dans des thérapies alternatives. Et de plus en plus, comme Thérèse, se tournent vers le régime cétogène. Quels sont les bienfaits apportés par cette alimentation chez le patient souffrant d'Alzheimer ?Témoignages de Thérèse B. et de son infirmière Edith M.

D’après l’OMS, 152 millions de personnes devraient souffrir de démence à l’horizon 2050. Parmi ces malades, au moins 60 % sont atteints d’Alzheimer. La maladie se manifeste par des troubles de la mémoire et une altération des fonctions cérébrales. Progressivement, les tâches du quotidien deviennent difficiles au point de finir par être impossibles. Tout comme s’adapter à de nouvelles situations. Il n’y a à ce jour aucun traitement pour en venir à bout.
Chez les personnes saines, le cerveau utilise du glucose produit par les glucides ou sucres de l’alimentation, comme carburant principal. Mais dans le cas d’Alzheimer, lorsque la maladie apparaît, les malades ne peuvent plus métaboliser le glucose qui devient donc une source d'énergie inefficace. La maladie d’Alzheimer est appelée par certains spécialistes « diabète de type 3 ».

Le régime cétogène est un régime très pauvre en glucides et très riche en graisses. Le suivre permet de modifier le carburant des cellules, notamment des neurones, qui se mettent alors à carburer aux corps cétoniques (molécules énergétiques fabriquées par le foie à partir des graisses alimentaires ou corporelles) et non plus au glucose. L’expérience du suivi de ce régime par des patients atteints d’Alzheimer démontrent son potentiel thérapeutique. Le témoignage d’une de mes patientes et de son infirmière sur le sujet.

Quels étaient vos symptômes de la maladie d’Alzheimer au moment où vous avez débuté le régime cétogène ?

Thérèse : Des vertiges avec chutes, surtout en extérieur, en jardinant, sur les changements de position. Je me disais, ça va passer. Beaucoup d’oublis, signalés par la famille. Je les expliquais par le fait que ma mère était décédée trois mois plus tôt et que j’étais en deuil. Peut-être déprimée. Je faisais aussi des fautes d’orthographe. Je ne l’avais pas réalisé. C’est mon fils qui en a témoigné à l’orthophoniste plus tard, alors que j’étais une personne avec un orthographe impeccable.

L’autre symptôme aussi est la perte de repères, notamment lorsque je prenais la voiture. Une fois garée, lorsque je devais retourner à mon véhicule, je me demandais où il se trouvait. Jusqu’à me perdre dans un village que je connaissais très bien mais où des travaux de réalisation d’un rond-point, m’ont bloquée, tétanisée, sans savoir où j’étais. J’étais en panique.

Edith : Nous connaissions Thérèse car nous prenions en charge sa mère au niveau de notre cabinet d’infirmier. Trois mois après son décès, nous la revoyons pour des prises de sang (bilan pour troubles de l’équilibre, chutes). D’avril à juillet 2017, Thérèse a de nombreuses consultations, à la recherche de troubles cardiaques, vasculaires, ORL, qui expliqueraient ces chutes. A partir de juin, nous faisons un passage infirmier quotidien pour surveillance. Thérèse est de plus en plus perdue, désorganisée, oublie les faits récents. Elle est désorientée, change de comportement, a des réponses non adaptées aux questions et connait une altération rapide des fonctions supérieures. Alors qu’elle était méthodique et rangée, elle ne parvient plus à assumer son quotidien.

A quel moment les médecins ont diagnostiqué la maladie ?

Edith : Le diagnostic d’une pathologie neurodégénérative à un stade débutant, type Alzheimer, a été fait en juillet 2017, suite à un IRM et une ponction lombaire.

Les résultats suivants sont alors ressortis :

  • Protéine TAU : 507 ng/l
  • Protéine amyloïde : 761 ng/l
  • Protéine phospho TAU : 86 ng/l

NB : Ce sont les biomarqueurs du liquide céphalo-rachidien dans la maladie d’Alzheimer en pratique clinique courante. Les résultats de Thérèse vont dans le sens d’une pathologie neurodégénérative type Alzheimer.

Au MMS (test de mémoire pour diagnostiquer la maladie d’Alzheimer), Thérèse a obtenu 21/30.

Qu’est-ce qui vous a incité Thérèse à mettre en place le régime cétogène ?

Edith : Grâce à un changement de pneumologue dans le cadre d’un suivi concernant l’asthme et l’apnée du sommeil. Il a envoyé Thérèse en cure en septembre 2017. Là, le Dr Guerin, pneumologue à la clinique du souffle à Riom-Es-Montagnes, qui avait des amis neurologues sensibilisés au régime cétogène, a fait une conférence sur les bienfaits de l’alimentation cétogène, notamment sur les pathologies neurodégénératives. A partir de là, Thérèse, déterminée à saisir l’opportunité d’aller mieux, a débuté la lecture d’ouvrages sur le sujet et a commencé seule, jusqu’à trouver vos coordonnées et vous rencontrer la première fois le 7 février 2018.

Le régime a-t-il été difficile à mettre en place, à initier ?

Thérèse : J’ai commencé seule en vidant tous les placards comme indiqué dans le grand livre de l’alimentation cétogène puis j’ai constitué la liste de tous les ingrédients adaptés. J’ai eu des difficultés pour comprendre les notions de nutrition, les quantités, à avoir des idées de recettes, à faire les menus de la semaine. Il ne faut pas oublier que j’étais dans un contexte d’évolution de la maladie, cela ne facilitait pas. J’oubliais au fur et à mesure de la lecture et je me perdais dans les calculs.

Edith : En revanche, elle n’a pas eu de difficultés à stopper le sucre. C’est un trait de caractère chez Thérèse.

Thérèse : Oui, puisqu’il faut arrêter, j’arrête ! Mais le suivi avec vous a été essentiel pour cadrer cette alimentation.

Avez-vous souffert d’effets secondaires ?

Thérèse : Pas d’effets secondaires au régime. Que des effets bénéfiques.

Edith : Sauf à être écœurée par la prise d’huile de coco du matin dans son café. Cela provoquait des nausées.

NB : l’huile de coco contient des TCM, des triglycérides à chaine moyenne, des graisses qui ont pour particularité de booster la production de corps cétonique par l’organisme.

 

Avez-vous constaté des effets bénéfiques rapidement ? Lesquels ?

Thérèse : Les effets positifs sont venus au bout d’un mois de prise d’huile TCM, en février 2018, en remplacement de l’huile de coco. Ils se sont renforcés au bout de trois mois. Concernant ces effets : absence de brouillard dans la tête, vivacité dans les idées, nouvelle clarté.

Edith : Elle était plus active dans sa tête, plus réactive. Il n’y a plus eu de vertiges et en plus une amélioration notable de la dyspnée et de l’asthme. Elle utilisait désormais 2 litres d’oxygène au lieu de 4 litres pour les efforts et les longues promenades. Des gros soucis relationnels récents avec ses enfants ont de nouveaux aggravé les problèmes respiratoires. Mais Thérèse reste stable sur le plan cognitif avec également une meilleure stabilité émotionnelle.

NB : un des constats lors des consultations en cabinet avec des patients atteints d’Alzheimer est que les TCM sont essentiels au régime cétogène dans le cadre de pathologies neurodégénératives et que la prise d’huile TCM contenant quasiment 100 % de TCM plutôt que de l’huile de coco, contenant seulement environ 50 % de TCM, permettait de plus grands bénéfices thérapeutiques.

Depuis combien de temps suivez-vous le régime ? Comment vous sentez-vous aujourd’hui vis-à-vis de la maladie ? Quels sont les symptômes qui ont disparu ? Ceux qui se sont amenuisés ? Lesquels persistent ? Y-a-t-il de nouveaux symptômes ?

Thérèse : Cela fait trois ans et demi. Je me sens bien surtout depuis la dernière consultation neurologique. Les examens sont nickel.

Edith : Le MMS s’est normalisé alors que les marqueurs de la ponction lombaire sont toujours présents. Le neurologue lui a donné un prochain rdv dans un an sauf si elle ressent à nouveau du brouillard ou autres symptômes. Dans ce cas-là, elle doit rentrer en contact avec lui avant.

Aujourd’hui, Thérèse peut lire toute sorte de bouquins, se rappelle du contenu, peut en faire des résumés. La lecture « coule ». Elle a retrouvé ses capacités d’orthographe, de calcul. La capacité d’évaluer le temps, de pouvoir s’organiser et prévoir en fonction de cette évolution de temps qui s’écoule. Par exemple, évaluer le temps de trajet pour aller d’un point à un autre.

Thérèse : Plus j’ai de la clarté dans mes pensées, plus je me rends compte que j’étais perdue au début de la maladie, sans le réaliser. Par exemple, je me revois dans mon couloir, bloquée à me demander ce que je dois faire, ce qui se passe ?! J’ai beaucoup de flashs sur mes états passés, ces états seconds.

Edith : Elle a retrouvé clarté, lucidité, concentration. Aucun nouveau symptôme de la maladie n’est apparu. L’amélioration neurologique est certaine. Thérèse a perdu du poids avec le régime : elle est passée de 89 kg est passée à 67 kg pour 1, 57 mètres. C’est une perte positive.  A ce jour, le seul point négatif, mais lié à un contexte familial avec l’asthme et l’apnée du sommeil, c’est la fatigabilité sur le plan respiratoire.

Thérèse : Je suis désormais capable de conduire à nouveau, de prendre les transports en commun.

Quel est le retour de vos médecins ?

Edith : Le neurologue est étonné et dit qu’il n’a jamais vu de patients comme elle. Mais aussi qu’il n’a pas le droit de dire que c’est grâce au régime cétogène que les symptômes de la maladie se sont améliorés. Il constate juste les faits. Lors de sa dernière consultation avec Thérèse en juin 2021, il lui a demandé de lui parler de son régime. « Je n’ai jamais vu ça de ma vie. Allez, parlez-moi de votre régime » sont ses mots.

Avez-vous un message à faire passer aux personnes souffrant de la même pathologie ? Aux soignants qui accompagnent ces patients ?

Edith : Thérèse parle beaucoup de sa famille médicale qui l’accompagnent dans son autonomie. Son orthophoniste, l’équipe ESA (Equipe Suivi Alzheimer), les infirmières à domicile, vous-même, le neurologue, les aide-ménagères, le pneumologue, la clinique du souffle. Elle trouve contre-productif de parler de la maladie en termes de « cette saleté », « cette pourriture ».

Thérèse : Toutes les maladies sont difficiles. Il ne faut pas se décourager, il y a des solutions. Il ne faut pas se contenter d’un suivi avec le médecin généraliste mais voir un spécialiste le plus tôt possible. Il faut s’informer sur le régime cétogène, l’adapter au mieux. Je ne donne jamais de détails sur mon régime quand j’en parle mais pour les personnes désireuses de le suivre, je les oriente vers une diététicienne compétente. Il faut être encadrer par un professionnel. Je donne juste parfois comme conseil : vous pouvez commencer par arrêter le sucre. Et déjà, juste avec ça, je vois que cela freine les personnes.

Edith : Thérèse souhaite témoigner, soutenir y compris sur les réseaux sociaux.

Thérèse : J’aimerais aussi partager mon expérience à la fac de médecine, par exemple, pour sensibiliser aussi les futurs soignants.

D’après des travaux1 de chercheurs de l’Université de Médecine de Baltimore dans le Maryland (Etats-Unis), publiés dans le Journal of the Alzheimer’s disease, la science confirme les bienfaits du régime cétogène dans le cadre de cette maladie. Ils ont suivi pendant 12 semaines 14 patients souffrant d’un début d’Alzheimer ou d’une déficience cognitive légère. La moitié d’entre eux a suivi un régime Atkins, qui réduit le taux de glucides à 20 grammes par jour sans restriction de calories. L’autre groupe devait suivre un régime similaire au méditerranéen, qui favorise les fruits, les légumes, les produits laitiers sans graisses, les graines et les protéines maigres donc plus riche en glucides. Dès la sixième semaine de régime, les chercheurs ont trouvé dans les urines du groupe Atkins, des cétones. C’est également à ce moment-là que la mémoire à court terme de ce groupe a commencé à s’améliorer lors des tests tandis, qu’au contraire, celle de l’autre groupe déclinait.
D’autres études doivent être menées pour confirmer ces découvertes préliminaires. Selon Jason Brandt, professeur en psychiatrie, sciences du comportement et neurologie, "C’est quelque chose que plus de 400 médicaments expérimentaux (testés entre 2002 et 2012, NDLR) n’ont pas réussi à atteindre dans les essais cliniques".

L’expérience en cabinet montre que d’autres maladies neurodégénératives peuvent connaître un résultat thérapeutique grâce au régime cétogène. La maladie de Parkinson en fait partie.

 

Livres à lire :

Le régime cétogène contre la maladie d’Alzheimer et Maladie d’Alzheimer. Et s’il y avait un traitement ? Dr M. Serrand. Editions Thierry Souccar.

Céto cuisine. Magali Walkowicz. Editions Thierry Souccar.

Alzheimer, Parkinson : le pouvoir thérapeutique du régime cétogène et de l’huile de coco. Dr Mary T. Newport. Editions Josette Lyon.

Le régime cétogène pour votre cerveau. Michèle Houde, Dr Bernard Aranda. Editions Thierry Souccar.

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